La récente décision du maire de Triel-sur-Seine, Cédric Aoun, d'instaurer un couvre-feu nocturne pour les mineurs suscite une vive polémique dans la commune et au-delà. Dès le début du mois de juillet, un arrêté municipal interdit aux moins de 18 ans de circuler seuls entre 23h et 5h du matin, sauf s'ils disposent d'une autorisation parentale spécifique. Cette mesure, prise en réaction à une recrudescence d'incivilités nocturnes, est vivement dénoncée par la Ligue des droits de l'homme (LDH).
La section locale de la LDH, contactée par l'AFP, estime que ce couvre-feu est « complètement inadapté », « pénalisant et inquiétant » et qu'il porte atteinte aux « libertés fondamentales d'aller et venir des jeunes mineurs », particulièrement durant la période estivale. Selon l'association, cette décision introduit une méfiance généralisée envers la jeunesse, en assimilant tous les mineurs à des délinquants potentiels.
« Cela introduit une méfiance envers les jeunes : tous sont jugés délinquants, potentiellement », s'indigne la LDH de Poissy et ses environs, qui étudie actuellement les suites juridiques à donner à cette affaire.
La municipalité justifie ce couvre-feu par la nécessité de garantir la sécurité des habitants et de prévenir de nouveaux incidents impliquant des mineurs, tels que des dégradations de mobilier urbain ou des vols. Le maire insiste sur le caractère préventif de la mesure et sur l'innovation que représente l'autorisation parentale, permettant aux jeunes encadrés par leurs parents de circuler malgré le couvre-feu.
La LDH rappelle que toute restriction à la liberté de circulation doit rester exceptionnelle, strictement encadrée et proportionnée à la gravité des faits. En France, la légalité d'un couvre-feu municipal pour mineurs dépend de critères précis : existence de troubles avérés à l'ordre public, limitation dans le temps et l'espace, et respect des droits fondamentaux. L'originalité de la dérogation parentale, qui n'est pas explicitement prévue par la loi, soulève également des interrogations sur sa portée juridique et sur le risque d'atteinte aux libertés individuelles.
La Ligue des droits de l'homme (LDH) a déjà contesté un arrêté pris par le maire de Triel-sur-Seine. En mai dernier, la LDH a saisi le tribunal administratif de Versailles pour demander l'annulation d'un arrêté municipal qui interdisait tout rassemblement de deux personnes ou plus « troublant la tranquillité, la sécurité et la salubrité publiques » dans plusieurs secteurs de la commune. La LDH estimait que cette mesure portait une atteinte excessive à la liberté d'aller et venir et à la liberté de réunion.
Le 7 juin dernier, le tribunal administratif de Versailles a suspendu l'exécution de cet arrêté, jugeant qu'il portait une atteinte grave et immédiate aux libertés fondamentales. Le tribunal a rappelé que de telles restrictions ne peuvent être décidées que si elles sont proportionnées, adaptées et strictement nécessaires au maintien de l'ordre public, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.