À Triel-sur-Seine, la lutte contre les incivilités nocturnes prend un nouveau tournant. Face à la recrudescence d'actes commis par des mineurs, le maire Cédric Aoun a décidé d'instaurer un couvre-feu : désormais, les moins de 18 ans n'ont plus le droit de circuler seuls dans la commune entre 23 h et 5 h du matin. Mais cette mesure, déjà adoptée ponctuellement dans d'autres villes françaises, se distingue ici par une innovation : la possibilité, pour les jeunes, de se déplacer malgré le couvre-feu s'ils sont munis d'une autorisation parentale de déplacement, sur le modèle des attestations utilisées lors de la crise sanitaire.
Ce document, qui doit mentionner le numéro de téléphone d'un représentant légal, permet à la police municipale de vérifier la légitimité de la sortie en cas de contrôle. L'objectif affiché est double : soutenir l'autorité parentale tout en renforçant la sécurité des mineurs et en prévenant les comportements à risque. La municipalité souhaite ainsi encourager un dialogue constructif entre les familles et les autorités locales, et éviter que les jeunes livrés à eux-mêmes ne soient impliqués dans de nouveaux incidents.
Mais cette initiative inédite soulève des questions de droit. En France, la légalité d'un couvre-feu municipal pour mineurs dépend de critères stricts. L'arrêté doit répondre à des troubles avérés à l'ordre public, être limité dans le temps et l'espace, et respecter la liberté d'aller et venir des jeunes, qui reste un principe fondamental.
Le Conseil d'État a déjà validé des arrêtés similaires, à condition que la commune puisse prouver l'existence de risques particuliers et que la mesure reste proportionnée à la gravité des faits. En l'absence de justification précise, le juge administratif peut toutefois annuler l'arrêté pour excès de pouvoir.
L'originalité de la dérogation parentale, qui n'est pas explicitement prévue par la loi, pose également question. Si elle permet de distinguer les jeunes encadrés par leurs parents de ceux qui ne le sont pas, certains s'interrogent sur sa portée juridique et sur le risque d'atteinte aux libertés individuelles. Les associations de défense des droits rappellent que toute restriction doit rester exceptionnelle et strictement encadrée.
Triel-sur-Seine devient ainsi la première commune de France à expérimenter une telle mesure, qui pourrait inspirer d'autres villes confrontées à des problématiques similaires. Reste à savoir si cette innovation résistera à un éventuel recours devant le tribunal administratif, et si elle fera école au niveau national.
Il est important de rappeler qu'un arrêté du maire de Triel-sur-Seine avait récemment été retoqué par le tribunal administratif. Cette décision souligne la vigilance des juges face à ce type de mesures restrictives, qui doivent répondre à des critères stricts de justification et de proportionnalité. En l'absence de troubles avérés ou de motivation suffisante, le juge administratif peut annuler un arrêté municipal pour excès de pouvoir.