La justice administrative vient de valider la position du département des Yvelines, propriétaire du parc du Peuple de l'Herbe où se situe l'étang. Le tribunal a estimé que « les objectifs poursuivis en termes de protection des écosystèmes et d'ouverture à un large public étaient désormais incompatibles avec l'occupation privative des berges de l'étang de la Galiotte, l'amarrage des chalets flottants faisant en outre obstacle à la volonté de renaturation des berges ».
Les magistrats ont rappelé que l'étang de la Galiotte relève du domaine public départemental, soumettant l'occupation de cet espace à des conventions précaires sans droit au renouvellement automatique. Une requérante qui contestait le non-renouvellement de sa convention d'occupation s'est vue déboutée de sa demande d'indemnisation de 98 000 euros.
Ces chalets flottants constituent un ensemble architectural exceptionnel en Île-de-France. À l'origine simples cabanons de pêche construits dans les années 1960 par d'anciens ouvriers de la carrière, ces 37 constructions se sont progressivement transformées en lieux de villégiature.
Emmanuel Soyer, président de l'association de la Galiotte, décrit ces habitations comme « un très bel exemple d'architecture populaire avec un ensemble de maisons disparates, qui ont chacune leur caractère ». L'association avait recueilli plus de 4 000 signatures dans une pétition pour sauver ces constructions, mettant en avant leur valeur patrimoniale et leur caractère unique.
Le conseil départemental justifie sa décision par plusieurs préoccupations environnementales. Sophie Danlos, directrice de l'environnement du département, explique : « On a constaté une détérioration de la berge. On a observé que la berge se détériorait, que les gens faisaient des aménagements non autorisés ».
Un rapport de l'agence Fox Consulting confirme que « la présence de nombreux cabanons est assez préjudiciable à l'expansion et à la présence pérenne des espèces floristiques et faunistiques ». Le département dénonce également la privatisation progressive du site avec "la construction de murs de soutènement, de jardins privés, de clôtures".
Après la destruction des chalets, le département prévoit une renaturation complète des berges avec la plantation d'espèces locales adaptées pour maintenir les talus et favoriser le développement de la biodiversité. Des platelages et des pontons d'observation doivent permettre au public de « reprendre possession de cet espace » dans ce parc qui accueille déjà 600 000 visiteurs par an.
Cette démarche s'inscrit dans un projet plus large concernant la boucle de Chanteloup-les-Vignes, fixé à horizon 2028-2029, incluant l'acquisition de terrains et la renaturation de l'ensemble de la zone.
Pour les habitants, ces chalets représentent bien plus que de simples constructions. Alain Chambard, propriétaire depuis une dizaine d'années, confie : « C'est un havre de paix, un antidote contre le stress ». Cécile Briard évoque un « enchantement » lors de sa découverte du site, comparant l'expérience à « Alice au Pays des Merveilles ».
Les occupants mettent en avant leur faible empreinte écologique, beaucoup fonctionnant à l'énergie solaire ou éolienne, utilisant des toilettes sèches et consommant peu d'eau. L'association avait proposé des solutions alternatives, notamment un projet éducatif et culturel avec des résidences d'artistes et des visites scolaires.
Malgré la décision de justice, des discussions auraient récemment repris entre les parties. Selon l'association, le département serait prêt à prendre en charge la destruction des cabanes et même à conserver celles en bon état, à condition que les propriétaires quittent les lieux dès cet été.
« La bonne nouvelle, c'est que la double peine qui était infligée aux occupants, de quitter les lieux et de détruire les chalets à leur frais, n'est plus d'actualité », souligne Emmanuel Soyer. Cependant, une interrogation subsiste quant à l'entretien futur des cabanes conservées, cet « habitat très fragile qui nécessite une attention constante ».
Avec cette décision de justice, c'est un demi-siècle d'histoire qui s'achève à l'étang de la Galiotte. Ces chalets flottants, immortalisés par Yann Arthus-Bertrand et devenus un symbole du patrimoine yvelinois, devront disparaître avant la fin de l'année 2025.