À la découverte des tombes des personnalités des Yvelines: De Romy Schneider à Charles Aznavour en passant par Jean Rochefort

Les Yvelines abritent un véritable panthéon du XXe siècle : Romy Schneider à Boissy-sans-Avoir, Charles Aznavour à Montfort-l'Amaury, Jean Rochefort à Grosrouvre.

Date de publication:

10.8.2025 7:21

Dernière modification:

10.8.2025 7:21

Par

Roberto Cristofoli

Visiter les tombes des personnalités célèbres n'est pas seulement un pèlerinage nostalgique, mais une occasion unique de plonger dans l'histoire et la richesse culturelle du département des Yvelines. Ces lieux de mémoire offrent un lien tangible avec des figures emblématiques du monde culturel, sportif et politique qui ont marqué leur époque. Explorer ces sépultures, souvent nichées dans des cimetières chargés d'histoire, permet aux habitants et visiteurs de mieux comprendre l'empreinte laissée par ces personnages dans la région et au-delà. Des grandes figures du cinéma aux hommes politiques, en passant par les artistes et les résistants, les Yvelines abritent un véritable panthéon de la France du XXe siècle.

Les tombes de personnalités par commune

Boissy-sans-Avoir

Romy Schneider (1938-1982) repose dans le cimetière de cette petite commune yvelinoise. L'actrice austro-allemande, devenue une icône du cinéma français, est surtout connue pour avoir incarné l'impératrice Sissi dans la trilogie de films éponymes. Sa carrière française, marquée par sa collaboration avec les plus grands réalisateurs comme Claude Sautet, Bertrand Tavernier ou Costa-Gavras, fit d'elle une figure majeure du septième art. Sa vie privée tumultueuse et sa mort prématurée à 43 ans dans son appartement parisien ont contribué à forger sa légende.

Civry-la-Forêt

Alain Cuny (1908-1994), de son vrai nom René Xavier Marie Alain Cuny, est inhumé dans le cimetière de cette commune. Né à Saint-Malo, cet acteur français au physique saisissant et à la voix si caractéristique fut l'une des figures emblématiques du théâtre et du cinéma français. Élève de Charles Dullin, il devint l'un des compagnons de la première heure de Jean Vilar au Théâtre national populaire. Au cinéma, il marqua les esprits dans "Les Visiteurs du soir" de Marcel Carné en 1942, incarnant le ménestrel Gilles. Sa collaboration avec les plus grands cinéastes italiens comme Fellini (« La Dolce Vita », « Satyricon ») et sa participation au film « Emmanuelle » en 1974 témoignent de la diversité de son talent.

Gambais

Liliane Montevecchi (1932-2018), danseuse, chanteuse et comédienne franco-américaine, est enterrée dans ce cimetière. Née à Paris, elle débuta sa carrière comme danseuse à l'Opéra de Paris avant de conquérir Broadway et Las Vegas. Elle devint une figure emblématique de la comédie musicale américaine, remportant notamment un Tony Award. Sa carrière l'amena à côtoyer les plus grandes stars du spectacle américain.

Grosrouvre

Jean Rochefort (1930-2017) repose dans ce cimetière depuis octobre 2017. Né à Paris, cet acteur français était reconnaissable à sa voix chaude, sa moustache et son style de jeu caractérisé par le flegme et l'ironie. Membre de la célèbre « bande du Conservatoire » avec Jean-Pierre Marielle, Jean-Paul Belmondo et Claude Rich, il s'imposa comme une figure du cinéma français dès les années 1960. Il apparut dans 113 films, incarnant des rôles mémorables dans "Le Grand Blond avec une chaussure noire", "Un éléphant ça trompe énormément", "Ridicule" ou "Le Placard". Passionné d'équitation, il possédait le Haras de Villequoy à Auffargis où il éleva des chevaux jusqu'à ce qu'une hernie discale l'oblige à cesser de monter.

Guitrancourt

Jacques Lacan (1901-1981) est inhumé dans cette commune. Ce psychiatre et psychanalyste français révolutionna la psychanalyse avec son "retour à Freud" et ses innovations théoriques comme le stade du miroir et l'inconscient structuré comme un langage. Après des études de médecine, il intégra la Société psychanalytique de Paris en 1934. Son enseignement, dispensé pendant près de trente ans dans ses séminaires, influença profondément la psychanalyse contemporaine. Il possédait une propriété à Guitrancourt, « La Prévôté », où il travaillait et constituait une importante bibliothèque. Il y mourut d'un cancer qu'il avait refusé de soigner.

Jouy-en-Josas

Léon Blum (1872-1950) repose dans le cimetière de cette commune. Homme de lettres, juriste et homme politique français, il joua un rôle majeur dans l'histoire politique française du XXe siècle. Né dans une famille juive modeste, il devint avocat puis entra en politique en s'engageant pour l'affaire Dreyfus. Membre de la SFIO, il dirigea le gouvernement du Front populaire de 1936 à 1937, mettant en place les congés payés et la semaine de 40 heures. Arrêté par le régime de Vichy en 1940, il fut déporté à Buchenwald. Libéré en 1945, il présida brièvement le gouvernement provisoire avant de se retirer dans sa propriété de Jouy-en-Josas où il mourut. Il eut trois épouses, dont Thérèse Pereyra qui fut son grand amour, et Jeanne Levylier qu'il épousa à Buchenwald en 1943.

Le Chesnay

Pierre Clostermann (1921-2006) est inhumé au cimetière du Chesnay. Né au Brésil d'un père diplomate, cet aviateur français fut surnommé « Premier chasseur de France » et devint le plus grand as français de la Seconde Guerre mondiale avec 33 victoires aériennes homologuées. Rejoint les Forces aériennes françaises libres en 1942, il pilota des Spitfire puis des Tempest. Après la guerre, il devint homme politique (député gaulliste de plusieurs circonscriptions), industriel et écrivain à succès avec « Le Grand Cirque », récit de son expérience de pilote de chasse vendu à plus de trois millions d'exemplaires. Il enseigna à l'école d'état-major de l'US Air Force et fut fait Compagnon de la Libération.

Le Tremblay-sur-Mauldre

Blaise Cendrars (1887-1961), de son vrai nom Frédéric Louis Sauser, est enterré dans cette commune. Écrivain suisse naturalisé français, il fut une figure majeure de la modernité littéraire du début du XXe siècle. Poète, romancier et aventurier, il vécut dans de nombreux pays avant de s'installer dans sa "petite maison des champs" du Tremblay-sur-Mauldre. C'est là qu'il écrivit ses plus grands romans comme « L'Or » (1925) et "Moravagine" (1926). Engagé dans la Légion étrangère en 1914, il fut amputé du bras droit en 1915, expérience qui inspira « La Main coupée ». Son pseudonyme fait référence aux braises et aux cendres, symbolisant la renaissance cyclique du phénix.

Le Vésinet

Gotlib (1934-2016), de son vrai nom Marcel Gottlieb, repose dans le cimetière de cette commune. Auteur français de bande dessinée, il fut l'un des piliers de la BD humoristique française avec des personnages comme Gai-Luron, les Dingodossiers et Superdupont. Fils d'immigrants juifs, il vécut les traumatismes de la guerre (son père fut déporté et assassiné à Buchenwald). Cofondateur des magazines « L'Écho des savanes » et « Fluide glacial », il révolutionna la bande dessinée française par son humour décapant et ses références à la culture populaire. Il cessa de dessiner au milieu des années 1980 mais resta une référence majeure du 9e art.

Montainville

Bourvil (1917-1970), de son vrai nom André Robert Raimbourg, est enterré dans le cimetière de cette petite commune. Né en Normandie dans une famille d'agriculteurs, cet acteur, chanteur et humoriste devint l'une des figures les plus populaires du cinéma français. Surnommé le « Fernandel normand », il se fit connaître avec la chanson « Les Crayons » en 1945 avant de tourner dans 52 films, dont « La Traversée de Paris », « Le Corniaud », « La Grande Vadrouille » et « Le Cercle rouge ». Il avait acquis en 1955 une propriété à Montainville où il aimait se ressourcer, s'occupant lui-même de l'entretien de sa maison et de son jardin. Il y vécut simplement, se déplaçant en Solex dans le village.

Ghislain Cloquet (1924-1981), directeur de la photographie réputé, repose également dans cette commune. Il collabora avec les plus grands cinéastes français et étrangers, contribuant à l'esthétique de nombreux chefs-d'œuvre du cinéma.

Montfort-l'Amaury

Ce cimetière abrite de nombreuses personnalités célèbres :

Charles Aznavour (1924-2018) repose dans la chapelle funéraire familiale qui domine le cimetière. Le chanteur franco-arménien, auteur-compositeur-interprète de génie, composa plus de 1000 chansons et vendit plus de 180 millions de disques dans le monde. Il vécut de nombreuses années près de Montfort-l'Amaury dans un domaine en lisière de la forêt de Rambouillet. C'est là qu'il accueillit Johnny Hallyday dans les années 1960. Il repose aux côtés de ses parents Misha et Knar, de son fils Patrick mort d'une overdose en 1976, et de son beau-frère Georges Garvarentz qui composa la musique de ses plus grands succès.

Thierry Gilardi (1958-2008), journaliste sportif emblématique, est également inhumé dans ce cimetière. Commentateur sur Canal+ puis TF1, il marqua le paysage audiovisuel français par sa passion communicative pour le football. Il habitait Montfort-l'Amaury avec sa famille et s'était engagé discrètement aux côtés de l'abbé Pierre pour aider les mal-logés.

Parmi les autres personnalités inhumées : Céleste Albaret (gouvernante de Marcel Proust), Germaine Beaumont (journaliste), Jean Marchat (comédien), Dany Robin (actrice), Georges Marchal (acteur), la Duchesse de Chârost, le Comte de la Boïssière-Chambors, et le Comte de Dion.

Neauphle-le-Vieux

Robert Lamoureux (1920-2011) est inhumé auprès de sa seconde épouse Magali de Vendeuil dans cette commune. Né à Saint-Mandé, cet acteur, humoriste, auteur dramatique et réalisateur devint célèbre au cabaret où il interprétait ses propres chansons et monologues. Il connut un immense succès au cinéma avec la série "Papa, maman, la bonne et moi" et incarna deux fois Arsène Lupin. Passé derrière la caméra, il réalisa la célèbre trilogie de "La Septième Compagnie" qui remplit les salles dans les années 1970. Auteur de 14 pièces de théâtre, il touchait à tous les aspects du spectacle.

Orvilliers

Georges Pompidou (1911-1974), 19e Président de la République française, est inhumé dans ce petit cimetière. Normalien et agrégé de lettres, il fut d'abord professeur avant de devenir l'homme de confiance de Charles de Gaulle. Premier ministre de 1962 à 1968 (le plus long passage à Matignon de la Ve République), il géra la crise de Mai 68 avant d'être élu Président en 1969. Modernisateur de la France, il lança de grands projets comme le Centre Pompidou. Atteint d'une maladie de Waldenström (forme rare de leucémie) qu'il dissimula, il mourut en exercice en 1974. Conformément à ses souhaits, il fut inhumé dans la plus stricte intimité à Orvilliers où il possédait une propriété, sous une simple dalle de pierre sans monument funéraire.

Raizeux

Robert Doisneau (1912-1994) est enterré avec son épouse Pierrette dans le petit cimetière de cette commune. Ce photographe français, figure emblématique de la photographie humaniste, immortalisa la France de l'après-guerre avec ses clichés en noir et blanc des rues de Paris, de sa banlieue et de ses habitants. Formé comme graveur-lithographe, il devint photographe et travailla pour l'agence Rapho. Ses 450 000 négatifs témoignent d'un demi-siècle de vie française. Ses grands-parents étaient originaires de Raizeux où il venait passer ses vacances d'enfance. C'est dans ce village qu'il rencontra sa future épouse Pierrette Chaumaison en 1934. La commune lui a rendu hommage en créant "le Chemin des Écoliers" où ses photos inédites du village sont exposées.

Saint-Rémy-lès-Chevreuse

Raymond Devos (1922-2006) vécut et mourut dans cette commune. Né en Belgique, cet humoriste français devint une figure majeure de l'humour français par ses sketches mêlant absurde, jeux de mots et philosophie populaire. Contraint d'arrêter ses études à 13 ans, il exerça divers métiers avant d'être déporté en Allemagne dans le cadre du STO. De retour à Paris, il se forma au mime chez Étienne Decroux et au théâtre. Découvert par Maurice Chevalier, il triompha sur scène avec des sketches comme "Le Plaisir des sens" ou "La Mer". Il s'installa en 1963 dans la vallée de Chevreuse qu'il ne quitta plus. À sa mort, il légua tous ses biens à la commune qui créa un musée dans sa villa, inauguré en 2016.

André Wogenscky (1916-2004), architecte et collaborateur de Le Corbusier, vécut et mourut également dans cette commune. Il fut l'un des principaux représentants de l'architecture moderne française.

Saint-Arnoult-en-Yvelines

Louis Aragon (1897-1982) et Elsa Triolet (1896-1970) reposent ensemble dans le parc du Moulin de Villeneuve. Ce couple mythique de la littérature française du XXe siècle forme l'une des plus belles histoires d'amour des lettres françaises. Aragon, poète, romancier et journaliste, rencontra Elsa Triolet en 1928 au café La Coupole à Montparnasse. Elle était la sœur de Lili Brik, muse de Maïakovski. Elsa, née en Russie, était traductrice, romancière et résistante. Elle fut la première femme à obtenir le prix Goncourt en 1944. Le couple s'installa en 1951 au Moulin de Villeneuve qu'Aragon avait offert à Elsa comme "un petit coin de France". Résistants pendant la guerre, communistes engagés, ils menèrent ensemble une vie d'écriture et d'engagement. Après la mort d'Elsa en 1970, Aragon arrêta symboliquement le calendrier et ne changea plus rien dans la maison qui est devenue un musée.

Thoiry

Jean-Pierre Cassel (1932-2007), de son vrai nom Jean-Pierre Crochon, est inhumé dans cette commune. Fils d'un médecin et d'une chanteuse d'opéra, cet acteur, chanteur et danseur français se fit connaître dans les années 1950-1960 comme jeune premier "bondissant" dans des comédies de Philippe de Broca. Excellent danseur formé par Gene Kelly, il maîtrisa parfaitement les claquettes et la comédie musicale. Sa filmographie impressionnante comprend "L'Ours et la Poupée", "Le Charme discret de la bourgeoisie" de Buñuel, "L'Armée des ombres" de Melville. Il remporta le César du meilleur second rôle en 1995 pour "La Cérémonie" de Chabrol. Père de Vincent Cassel, il resta modeste et discret malgré sa réussite. Il mourut d'un cancer à son domicile parisien.